20.9.05

Projet de Maîtrise vulgarisé


Elaboration d’une méthode pour évaluer l’âge des cétacés à partir de leur longueur de télomères
Joanna Prime et Michel Fournier de l’ INRS-IAF, La station de recherche des îles Mingan sur les cétacés (MICS), le Groupe de Recherche et d’éducation sur les Mammifères Marins (GREMM).
Ce texte a servi à l'élaboration d'un article, rédigé par "Baleines en direct" sur le site suivant : Les rorquals à bosse ont l'âge de leurs télomères

Pour connaître l’âge de la plupart des mammifères vivants, il suffit de regarder leur dentition. Malheureusement, cette technique ne s’applique pas à tous les mammifères, notamment les mammifères marins. A l’heure actuelle, il est donc impossible de déterminer l’âge d’un cétacé vivant, à moins de l’avoir vu naître.
La technique consistant à compter le nombre de couche de dentine, élément composant la dent, à partir d’une coupe transversale de dent, s’applique actuellement sur les carcasses des cétacés à dents, appelés odontocètes. En effet, il est impossible d’endormir ces animaux, donc impossible de les immobiliser afin de prélever quelques dents. De plus, cette méthode ne peut s’appliquer aux mysticètes, ou baleines à fanons, car elles ne possèdent pas de dents.

Ici, nous avons tenté de déterminer l’âge des cétacés, sans endommager les animaux, en mesurant leurs télomères.

Qu’est-ce qu’un télomère ?

Afin de maintenir les tissus de notre corps, les cellules vivantes qui les constituent se divisent continuellement (division cellulaire). Les chromosomes, qui portent l’information génétique, se dédoublent peu de temps avant la division cellulaire. Ce phénomène est appelé la réplication de l’ADN. La machinerie qui s’occupe de cette action ne permet pas de répliquer la fin des chromosomes. Pour palier à ce problème, il existe une partie ne codant pour aucune fonction vitale à la fin des chromosomes. Cette région est appelée télomères.
Donc, si les cellules se divisent avec l’âge des organismes, les télomères tendent à diminuer. Ainsi, la taille des télomères reflète l’âge de la cellule. Mais l’âge de la cellule reflète-t-il l’âge de l’individu ?

Comment mesure-t-on les télomères ?

Tout d’abord, il faut pouvoir prélever du tissu de baleines. Les espèces que nous avons étudiées ici sont le béluga (odontocète) et le rorqual à bosse (mysticète). Ces deux espèces se retrouvent dans l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent, Québec, Canada.
La peau de bélugas est prélevée à partir de bélugas échoués, conservée au froid et transférée dans une solution conservatrice. Celle des baleines à bosse est prélevée avec une arbalète, sur des animaux nageant librement et placée dans la même solution conservatrice.
Pour extraire l’ADN, matière contenant l’information génétique, on broie le tissu. Cette action permet de séparer toutes les cellules. Puis, on fait éclater les cellules grâce à une solution appelée lyse cellulaire. Après centrifugation, l’ADN se retrouve au fond du tube.
Les télomères sont séparés du reste de l’ADN par une coupure nommée digestion enzymatique. Les fragments obtenus sont mesurés à l’aide d’une sonde radioactive télomère-spécifique.

Quels sont les résultats obtenus ?

Pour la première fois, la séquence qui compose les télomères des baleines à bosse et des bélugas a pu être identifiée. Elle est la même que celles de beaucoup d’autres mammifères comme l’homme. La relation entre l’âge et la longueur des télomères n’est pas significative pour ces deux espèces. Ces courbes ne peuvent donc pas servir de référence afin de déterminer l’âge de nouveaux individus. Cependant, on peut observer une tendance à la diminution chez les baleines à bosse qui n’est pas présente chez les bélugas.

Et la télomérase dans tout ça ?


Pour éviter ce mécanisme de raccourcissement des télomères, certains types cellulaires proliférants (comme les cellules servant à la reproduction) possèdent un système permettant de rallonger les chromosomes. Cette machine est appelée la télomérase. Elle permet de garder intacte l’information génétique et de ne pas léguer à notre descendance un héritage trop vieux.
On a retourvé cette télomérase dans des échantillons de peau de bélugas.

Conclusions de cette etude ?

La séquence des télomères rencontrée chez les bélugas ainsi que chez les baleines à bosse a pu être identifiée. Pour les baleines à bosse, la courbe “Longueur des télomères en fonction de l’âge” montre une tendance à la diminution mais cette relation est non significative. Il serait intéressant de poursuivre ces expériences sur un nombre plus grand d’individus pour confirmer cette tendance. Pour les bélugas, cette courbe ne montre pas de relation significative. La télomérase, qui rallonge les télomères, est active dans les 2 biopsies testées. Des travaux sur des bélugas vivants, d’âge connu, effectués en parallèle avec la population de bélugas de l’Arctique comme contrôle négatif nous permettrait de savoir si cette activité télomérasique est liée aux taux de contaminants présents dans l’Estuaire du Saint-Laurent.

19.9.05

Cacophonie chez les baleines

Après les méfaits d’une industrie baleinière abusive, les cétacés sont la cible d’autres attaques. Leur environnement est considérablement dégradé : contamination chimique des eaux, décharges marines, surexploitation par la pêche entraînant un manque de proies. La pollution sonore vient s’ajouter à la pollution chimique. Les bruits sous-marins de nature humaine ont bien des origines : exploration en pleine mer d’hydrocarbures, exploration sismique, extractions de minerais, dragage des océans, navires de pêche, recherche océanique acoustique, activité militaire et trafic maritime allant de lourds cargos aux bateaux de plaisance en passant par les croisières aux baleines. Ces nouvelles agressions ont lieu dans tous les océans du globe. Certains scientifiques les accusent même d’être responsables d’échouages massifs. Quelle est l’origine d’un tel brouhaha dans nos mers et quels en sont les effets sur les cétacés ?

Chut, je vois les sons…

Nous sommes à 40 m de profondeur. Ici, près de 90 % de l’énergie lumineuse a été absorbée. Il fait sombre. Et pourtant, un dauphin surgit sur un thon. Il n’a pas droit à l’erreur car cette proie constitue son seul repas. A 200 ou 400 m de profondeur, aucune lumière ne pénètre plus. Quant à l’odeur, les baleines n’ont pas de nez. Ou très peu. Mais comment font-ils pour être si précis ? Dans ces conditions, il est facile de comprendre que les cétacés ont développé une ouïe extraordinaire. Le conduit auditif externe est très petit, généralement bouché par des couches de cire qui s’accumulent avec l’âge. Heureusement, les structures auditives sont mal isolées du milieu environnant. Cela permet une meilleure propagation du son externe jusqu’à l’oreille interne. Les sons peuvent aussi être reçus par la mâchoire inférieure. Les vibrations sont amplifiées, recueillies par un cordon graisseux et transmises à l’oreille interne. Enfin, les régions du cerveau servant à l’analyse des sons, les lobes temporaux, ainsi que le nerf transmettant les signaux auditifs, le nerf acoustique, sont extrêmement développés.


La pollution sonore, jusqu’à la mort.

Attention, mettez vos casques anti-bruit car une explosion va avoir lieu dans les eaux australiennes. C’est à plus de 20 000 km et pourtant le son généré par 120 kg de dynamite traverse l’océan atlantique et se retrouve dans la mer des Caraïbes en 4 h à peine. Ces résultats sont le fruit d’une expérience scientifique mais qu’en est-il de tous les sons produits par l’industrie, les ferry, les sous-marins de l’armée ?

15 Mars 2000. Tout semble calme et pourtant. 16 cétacés s’échouent ce jour-là aux Bahamas. Des baleines à bec mais aussi des petits rorquals. Les autopsies ont montré du sang dans les oreilles internes et un dommage au cerveau. US Navy a admis que l’utilisation de systèmes de sonars de haute densité ce jour-là était responsable du grand nombre d’échouage. À la suite de cet essai, le nombre de baleines à bec vues dans cette zone a considérablement chuté, laissant supposé que beaucoup plus furent touchées. C’est la première fois que l’armée reconnaît son implication dans des échouages de cétacés. Certains affirment que ce drame est le résultat de conditions exceptionnelles. Les baleines n’ont pas pu remonter à la surface et échapper à cette vague sonore car elles se nourrissaient dans des canyons sous-marins. D’autres ont été observées, déroutées, nageant en cercle après que des biologistes aient tenté de les remettre à l’eau. Les sonars semblent assourdir et étourdir les baleines, les rendant vulnérables aux échouages mais aussi aux attaques de prédateurs.

5 Mai 2003. L’USS Shoup fait des essais de sonars. Des experts sur des orques reportent un comportement anormal, comme une fuite. Aucun dommage permanent ou temporaire du système auditif n’a été noté pour cette espèce. Pourtant non loin de là, 15 marsouins sont retrouvés échoués.

Les sonars ne sont pas les seules causes d’échouages. Les explorations sismiques sont aussi montrées du doigt. « Il est impensable que nous nous engagions dans des activités endommageant l’écologie globale » affirme Michael Purdy, géophysicien et directeur de l’institut de Lamont-Doherty. C’est pourquoi le Maurice Ewing, bateau de recherche scientifique est contraint de faire demi-tour des Bermudes en Novembre 2003 et du Mexique en Février 2004 et d’abandonner 2 projets. Le montant est estimé à 2,6 millions de dollars (US). Une croisière prévue pour Janvier 2004 est également retardée au large du Venezuela pour éviter la saison de migration des baleines à bosse. Les chercheurs emploient des pistolets à air comprimé générant des ondes sonores pour sonder les formations rocheuses sous-marines. Cette activité nuit aux mammifères marins. En 2000, 3 baleines à bec sont retrouvées échouées aux Galápagos. En 2002, ce sont 2 baleines à bec qui sont retrouvées sur la côte Ouest du Mexique. Ces échouages ont eu lieu durant des études du Maurice Ewing même si aucune corrélation n’a été démontrée.


« Depuis 20 ans, j’étudie les baleines du Saint-Laurent et jamais je n’ai été aussi inquiet pour leur avenir » témoigne Robert Michaud, scientifique au groupe d’études des mammifères marins. Cette déclaration fait suite à la très controversée exploration pétrolière qui doit avoir lieu dans le Golfe du Saint-Laurent. « On parle d’explosions de milliers de livres par pouces, de déplacements d’eau et de détonation assez fortes pour tuer des grands cétacés » explique Daniel Green, de la branche canadienne du Sierra Club. Ces eaux sont les niches écologiques d’un grand nombre d’espèces. Des plus petites, les marsouins, en passant par diverses espèces de dauphins et de rorquals comme les rorquals communs, jusqu’aux plus gros mammifères que la Terre est jamais portée, les baleines bleues. Tous se donnent rendez-vous. Un moratoire a donc été mis en place jusqu’à l’apport de nouvelles preuves.

Le nez argenté, lisse, le Chat vogue dans la baie de Fundy. Ce traversier est un des plus rapides de l’Amérique du nord. Il peut naviguer jusqu’à 90 km/h. Sa mise à l’eau, en 1998, a suscité des inquiétudes de la part des chercheurs. En effet, ces eaux sont le sanctuaire de la baleine franche, espèce en voie d’extinction. Mais il faut de gros moteurs pour propulser une telle charge. Et le bruit créé par ce navire ne fait qu’ajouter un peu de pollution sonore ambiante. De plus, à de telles vitesses, comment éviter un des derniers Léviathans ? Le heurt des baleines par les bateaux et surtout par leurs hélices est une cause fréquente de décès. Avec les filets de pêche, il représente 46 % de la mortalité de baleines noires de l’Atlantique Nord recensée entre 1970 et 2001.

C’est l’été en mer de Beaufort. La population de bélugas mène une vie tranquille. Les premières glaces arrivent avec l’automne. Avec elles, les problèmes de communications. Le bruit qui couvre les chants de ces canaris des mers n’est pas lié aux craquements de la glace ni aux courants et aux vents qui soufflent les morceaux. Non. Les bélugas entendent le Henry Larsen sur de longues distances, allant de 35 à 78 km. Ce brise-glaces propulse de l’air qui pousse la glace hors du couloir de navigation. Les signaux de communication, d’écholocation, les sons servant à s’orienter, à détecter des proies ou des prédateurs sont masqués dans une zone de 14 à 71 km. Les bélugas tentent de fuir le navire dès qu’ils le détectent. Mais lorsque l’animal est trop près, entre 1 et 4 km du bateau, son système auditif peut être touché. On observe alors un dommage auditif temporaire, pour au moins 20 min. Face à trop de bruit, les cétacés tentent de fuir. La première stratégie consiste à passer plus de temps sous l’eau, nager plus lentement et diminuer le temps alloué à la respiration. La deuxième stratégie est de changer de direction, diminuer le temps de plongée, nager plus vite et passer plus de temps à la surface. Ce phénomène a été observé pour un grand nombre d’espèces, à travers tout le globe.

Les méfaits de l’écotourisme

Au début passives, voire coopérantes, les baleines à bosse se sont lassées de notre jeu. Depuis les années 80, les baleines ont connu un engouement de la part du public. Ainsi, les croisières aux baleines se sont multipliées. Malheureusement, tout cet écotourisme provoque une augmentation de sons dans les aires fréquentées par les baleines. Depuis 1978, on a pu observer des cas où elles chargeaient à l’approche des bateaux ou encore « criaient » sous l’eau. Les baleines sont donc stressées par le bruit et modifient leurs comportements aériens ou leurs échanges sociaux.

C’est l’hiver à Hawaii. Les baleines à bosse sont venues, comme chaque année, passer l’hiver dans des eaux chaudes. C’est l’époque où les femelles rejoignent leurs chanteurs pour s’accoupler. Elles sont là pour se reproduire, mettre bas. Ces moments sont le siège d’interactions sociales, de démonstration impressionnante telle que les sauts hors de l’eau ou le battement des nageoires pectorales et de la queue. Or, ces comportements sont très prisés par les croisières aux baleines. Même si les chants des baleines sont nombreux et assez forts pour dépasser les bruits de bateaux, il est peu probable qu’elles n’entendent pas le son des moteurs. Malgré le fait qu’ils ne produisent aucun dommage au niveau du système auditif, les baleines interrompent leurs activités pour fuir cet embarras sonore. Leurs comportements sont là aussi modifiés. Elles changent brusquement de direction, restent immergées plus longtemps, essayant de fuir cette nuisance. Elles interrompent leur activité de chasse, d’allaitement et sont gênées durant la mise-bas. C’est là que les sons d’origine humaine posent problèmes. Le taux de reproduction est faible chez ces animaux. Les baleines à bosse ont, comme les orques, quand les conditions sont optimales, un petit tous les 2 à 3 ans. C’est également le cas du béluga dont la gestation est de 14 mois. Tout ceci affecte la survie de la population.
Le ferry approche, accompagné de plusieurs bateaux écotouristes. La population de bélugas de l’Estuaire du Saint-Laurent connaît la même gêne que celle des orques de Washington. Le bruit de fond sous-marin interfère avec la détection et la discrimination de signaux cruciaux aux membres d’une espèce. Les animaux, pour compenser le bruit anthropogénique, changent leurs chants à l’arrivée d’un bateau. Les bélugas chantent moins et augmentent la fréquence d’émission. Les orques, pour surpasser ces interférences, augmentent le volume, l’amplitude et la durée des signaux. On ne connaît pas la signification de tels changements mais ils sont d’autant plus importants que le bateau est gros.

Les cétacés ne sont pas les seuls touchés par le bruit anthropologique. Il représente une menace pour toute l’écologie marine. Après la surexploitation, le bruit peut donc être une nouvelle source de danger pour certaines espèces de poissons ou de crustacés. L’ouie des poissons baisse avec le bruit. Or, les poissons se servent de ce sens pour chasser, sonder, fuir des prédateurs ou s’accoupler. Les crevettes aussi sont touchées par ce vacarme. Et c’est la qu’il faut tirer l’alarme car les poissons et le krill sont la nourriture principale des cétacés. Cette pollution atteint donc les cétacés à un autre niveau d’atteinte.

Silence SVP. On chante !

Les cétacés sont capables de produire des sons allant de 20 Hz à 20 000 Hz, spectre audible à l’oreille humaine, mais aussi des infrasons, inférieurs à 20 Hz et des ultrasons, jusqu’à 250 000 Hz. Ce large spectre couvre une grande variété de sons comprenant des meuglements, des gargouillements, des grognements, des clics ou encore des sons de cloche. « Je me souviens avoir posé les yeux sur une carte des océans et avoir brusquement réalisé…J’écoutais une baleine qui ne se trouvait pas à 10 ou même 100 km de là. Elle se trouvait bel et bien à plus de 1 000 km !! » confie Christopher Clark, directeur du programme de recherche de bioacoustique à l’université de Cornell écoutant les sons produits un rorqual bleu. Ici, entre la couche d’eau chaude et la couche d’eau froide, entre 100 et 1000 m de profondeur, à une certaine pression, toutes les conditions sont favorables à une bonne transmission des infrasons. Ces ondes de moins de 20 Hz empruntent des chenaux acoustiques et se diffusent sur de très grandes distances. En plus, la baleine bleue est capable de produire un son plus fort que le bruit d’un avion de ligne à réaction. Ces sons serviraient à une communication entre deux individus séparés par une très grande distance et permettre ainsi individus de se retrouver à des milliers de kilomètres de là. Ils permettent aussi aux animaux d’avoir une idée du relief sous-marin ou de sonder la température des eaux environnantes. Ceci peut s’avérer très utile pour lutter contre le froid des océans ou pour la recherche de nourriture.

Selon la fréquence utilisée, les sons n’ont pas la même fonction. Chez les baleines à dents, les fréquences audibles pour l’homme (20 à 20 000 Hz) ont tout d’abord une fonction sociale. Elles symbolisent la cohésion. On peut les entendre lors de l’arrivée d’un groupe dans un territoire familier, lors de retrouvailles entre des individus et leur groupe. On les soupçonne également d’être à l’origine des échouages massifs. Un groupe entendant des signaux d’un individu en détresse et décidant de se rapprocher peut ainsi se mettre en danger. Un orque chasse. Elle veut semer la panique dans un groupe de phoques, d’otaries ou de petits cétacés. Il ne lui reste plus qu’à produire ce type de sons. Les animaux sont déstabilisés par l’attaque. La chasse est alors plus facile. Elles permettent aussi à chaque groupe de s’identifier. Ceci est valable pour des espèces de structures sociales complexes comme les cachalots, les dauphins, les narvals ou les orques.

Un groupe de dauphins approchent. L’analyse des sons révèle que de nombreux clics sont émis. Ces clics sont-ils rapides et de fréquence élevée ? Alors les dauphins sont en pleine chasse. Sont-ils de basse fréquence, produit lentement ? Alors les animaux explorent ce nouveau lieu. Les baleines sont capables d’une parfaite analyse du milieu environnant par une image acoustique. Ce système ultra perfectionné, qui ressemble à l’échographie, est appelé écholocation. Les baleines à dents émettent des ultrasons, clics de 25 000 à 250 000 Hz. La production de ces clics varie selon l’activité des animaux. Lors de la chasse, on obtient une image précise et plus proche. Lors de l’exploration d’un lieu, on obtient une image floue mais lointaine. Ces sons sont réverbérés par un objet et reviennent ensuite aux cétacés. Ils permettent l’identification de proies ou d’obstacles. Par exemple, les baleines sont donc capables de repérer des billes de 5 à 7 cm de diamètre selon leur consistance à 70 m de distance. Chez les mysticètes, se nourrissant d’énormes bancs de krills, la nécessité d’un sonar est moins grande. Ce système est donc nettement moins développé.


Il existe deux théories sur la provenance de ces sons. La première, la plus couramment acceptée, veut que les sons soient produits au niveau du conduit respiratoire, entre le crâne et l’évent, par des sacs périnasaux. Ce déplacement d’air produit des vibrations qui sont redirigées par la mâchoire supérieure à travers les graisses du melon. La deuxième théorie est que les cordes vocales produisent des sons transmis par les os du museau et du rostre.
La cacophonie océanique affecte les cétacés à deux niveaux. Le premier se situe au niveau de l’oreille et autour du cerveau. L’oreille interne baigne dans un liquide composé de mucus et d’huile. On y retrouve de petites bulles d’air. Lors d’une plongée, l’animal est sujet à des variations de pression. Afin d’éviter des sons produits par des sonars ou l’explosion de canons à air comprimé, l’animal remonte rapidement à la surface. Il lui arrive alors un accident de décompression. Du nitrogène se forme dans ses tissus, entraînant une hémorragie. Le deuxième niveau d’atteinte se voit à long terme. Le bruit de fond sous-marin constant vient déranger les baleines dans leurs activités journalières. Ces animaux peinent à se nourrir ou se reproduire. La survie de certaines espèces est alors menacée par notre brouhaha.